# Les Maladies Trophoblastiques Gestationnelles : Etude Prospective a Propos De 36CAS H. Ramsiss ? , M. Sebti ? , M. Yousfi ? , S. Amrani ? , A. Ragala ¥ , MA. Benyahia § & S. Bargach ? Resume-Les maladies trophoblastiques correspondent à un groupe très hétérogène de pathologies rares, potentiellement agressives, chez les femmes jeunes désireuses de grossesses ultérieures. Le présent travail représente une étude prospective portant sur les cas de maladies trophoblastiques colligés au service de gynécologie obstétrique cancérologie et grossesse à haut risque de la maternité SOUISSI sur une période de 30 mois. Le but de notre travail est de rapporter le profil épidémiologique, clinique, thérapeutique et évolutif de cette entité pathologique. Nous avons recense 36 cas de môle hydatiforme ; parmi 10475 accouchements et 787 avortements spontanés, ce qui donne une fréquence de 1/290 accouchements et 4.6 % des avortements. La moyenne d'âge était de 33 ans (extrêmes 17-57 ans). La multiparité était retrouvée dans 30 % des cas. Le diagnostic était posé au premier trimestre chez les deux tiers des patientes. Le motif de consultation était des métrorragies chez 84% des cas associées à des douleurs pelviennes dans 43% des cas ; le syndrome toxique était présent chez 13% des patientes. Le diagnostic était évoqué sur les données clinique-échographique et biologique et confirmé par l'étude anatomopathologique dans 86% des cas. Le traitement consistait à une aspiration endo-utérine avec un suivi de la décroissance des ?hCG. 68% des patientes avaient une évolution favorable. 32% des cas avaient évolué vers des tumeurs trophoblastiques qui étaient tous de bas risque. L'évolution était favorable pour la majorité d'entre elles sous chimiothérapie. Mots Clés: maladies trophoblastiques; tumeurs trophoblastiques; ?hCG; chimiothérapie. Abstract-The trophoblastiques diseases correspond to a very diverse group of rare, potentially aggressive pathologies, at the young women avid for later pregnancies. The present work represents a prospective study concerning the cases of trophoblastiques diseases observed in the maternity SOUISSI over a period of 30 months. The purpose of our workis to report the epidemiological, clinical, therapeutic and evolutionary profile of this pathologicalentity. We have list count 36 cases of hydatiforme mole; among 10475 deliveries) and 787 miscarriages, what gives a frequency of 1/290 deliveries and 4.6 % of abortions. The average of age was 33 years (17-57 years). The multiparity was found in 30 % of the cases. The diagnosiswas put in the first trimèstrepregnancy to twothirds of the patients. The motive for consultation was métrorragies to 84 % of the cases associates in pelviennes pains in 43 % of the cases; the toxic syndrome was present at 13 % of the patients. The diagnosis was evoked on the clinic, échographic and biologic and confirmed by the anatomopathologique studyin 86 % of the cases. The treatment consisted in an endo-utérineaspiration with a followup of the diminution of ßhCG. 68 % of the patients had a favorable evolution. 32 % of the cases had evolved towards trophoblastiques tumors which were all of low risk. The evolution was favorable for the majority of them under chemotherapy. # I. Introduction ippocrate était probablement le premier à décrire la maladie trophoblastique gestationnelle autour de 400 av. J-C dans sa description d'hydropisie de l'utérus [1]. Bien que d'autres observations aient été faites depuis, Marchand était le premier qui a associé la môle hydatidiforme avec la grossesse en 1895. C'est un groupe très hétérogène de pathologies rares. Il s'agit, pour la plupart, de pathologies d'excellent pronostic, très chimiosensibles. Nous rapportons une série de 36 observations de maladies trophoblastiques. Nous allons présenter nos résultats, insistés sur les modalités diagnostiques et thérapeutiques, ainsi que les moyens de surveillance et l'évolution. # II. Matériel et Méthodes D'étude Notre travail est une étude prospective étalée sur une période de 30 mois, allant de Janvier 2012 à juin 2014, et portant sur 36 cas de maladies trophoblastiques gestationnelles colligées au service de gynécologie obstétrique cancérologie et grossesse à haut risque de la maternité Souissi. Les critères d'inclusion étaient les suivants : toutes les môles évoquées cliniquement et échographiquement puis confirmées à l'examen anatomo-pathologique. Nous avons relevé les caractéristiques des patientes, les modalités diagnostiques et thérapeutiques ainsi que le suivi post-môlaire. # III. Résultats a) L'incidence Durant la période d'inclusion des malades nous avons admis 10475 femmes pour accouchements, et 787 patientes pour avortements spontanés avec expulsion spontanée ou ayant nécessité un curetage. Pendant la même période, nous avant recensé 36 cas de maladies trophoblastiques gestationnelles soit une fréquence 1/290 accouchements et 4.6% avortements. # b) Caractéristiques des patientes La tranche d'âge entre 20 et 29 ans était la plus concernée (47%) suivie de celle de 40-49ans avec 27%. La moyenne d'âge était de 33ans, avec des extrêmes de 17 à 57ans. L'élévation de la fréquence des grossesses molaires parallèlement à l'augmentation de la parité est presque toujours rapportée ; Nous notons un pic de fréquence chez les multipares (30%), cependant la proportion des nullipares était élevée (19%). Nous avons relevé l'antécédent d'un avortement antérieur dans 12cas, et 2 avortements dans un cas ; aucune patiente n'avait d'antécédent de môle hydatiforme. 47% de nos patientes avaient un groupe sanguin O, 31% un groupe A et 14% un groupe B. Ces différences ne sont pas significatives par rapport à la population générale. Trois patientes sont rhésus négatif, l'immunoglobuline anti-D était prescrite. # c) Diagnostic Le motif de consultation était des métrorragies chez 84% des cas. Les métrorragies étaient de grande abondance chez deux cas nécessitant une prise en charge urgente et une transfusion en culots globulaires. 43% patientes avaient présenté des douleurs pelviennes et 13% des cas des signes sympathiques exagérés de grossesse. Deux femmes étaient admises dans un contexte fébrile et quatre cas étaient diagnostiqués fortuitement à l'échographie. L'âge gestationnel au moment du diagnostic variait de 6 à 24 semaines d'aménorrhée avec une moyenne de 11 semaines. Le diagnostic était posé au premier trimestre chez les deux tiers des patientes. L'examen physique retrouvait un gros utérus dépassant l'âge théorique de la grossesse dans 95% des cas, et une masse latéroutérine uni ou bilatérale dans 11% des cas. L'échographie montrait un utérus augmenté de taille siège d'un matériel hétérogène en « flocons de neige » ou en « grappes de raisin » chez 95% des patientes associé à un sac gestationnel sans embryon chez trois d'entre elles. On a retrouvé chez une patiente une grossesse arrêtée à 9 SA avec un placenta hypertrophié hétérogène dont l'étude anatomopathologique était en faveur d'une môle partielle. Les kystes lutéiniques étaient présents chez 11% des cas, leurs tailles variaient de 6 à 10cm. Les ?hCG plasmatiques étaient mesurés chez toutes les patientes. Leurs taux initial variaient de 6900 à 1352000 UI/L. 73% des cas avaient un taux supérieur à 105UI/ml (69% des môles complètes, 25% des môles partielles). La numération formule sanguine montrait une anémie chez 40 % de nos patientes. # d) Traitement Le traitement de base de toute môle repose sur l'évacuation utérine par aspiration avec vérification de la vacuité utérine à l'aide d'une échographie peropératoire, sous perfusion d'ocytociques et couverture antibiotique. Ce geste était réalisé pour toutes nos patientes ; nous n'avions pas notés de perforation utérine. Un contrôle échographique systématique s'effectuait après l'aspiration, généralement au 10ème jour. Il avait montré un utérus vide chez 67% des cas et une rétention (diamètre antéropostérieur supérieur ? à 17 mm), dans 28% des cas. Ces dernières ont bénéficié d'une deuxième aspiration qui avait assuré la vacuité utérine. L'étude anatomopathologique du produit d'aspiration avait retrouvé 43% de môles complètes, et 43% de môles partielles. Elle n'était pas concluante dans quatre cas. # e) Évolution Chez 68% patientes, le suivi régulier avait montré une négativation des ?hGC entre 6 et 10 semaines. 32% des patientes avaient présenté une évolution perturbée des ?hCG plasmatiques alors que la majorité d'entre elles étaient asymptomatiques. Elles étaient considérées comme des tumeurs trophoblastiques gestationnelles selon les critères proposés en 2000 par le FIGO. On avait procédé à la réalisation d'un bilan d'extension. Au terme de ce bilan on avait calculé le score selon la classification pronostique FIGO. Toutes nos patientes étaient à bas risque (score ? 6) et elles n'avaient pas de métastases. On avait opté pour une mono-chimiothérapie à base de méthotrexate (Une injection IM de 0.4 mg/kg/j pendant cinq jours), en fonction de la tolérance, le rythme était bimensuel ; et ce jusqu'à normalisation des ?hCG en rajoutant deux cures après négativation. Nous avons obtenu un taux de rémission complète de 97%. Chez une patiente, les ?hCG se sont négativés pendant 9mois puis on avait constaté une ascension rapide de leur taux à plus de 105 U/l. L'échodoppler pelvien était en faveur d'une môle invasive ou choriocacinome sans métastases au bilan d'extension. La patiente avait reçue quatre cures de polychimiothérapie à base d'EMACO. Elle est actuellement à un an de surveillance après négativation des ?hCG. Toutes nos patientes étaient sensibilisées de l'importance d'une contraception efficace durant la période de surveillance. Le moyen choisi dans notre service est la contraception hormonale oestroprogestative ; La grossesse n'est autorisée qu'à la fin de la surveillance selon les recommandations de la FIGO. On avait noté trois grossesses, deux après une grossesse môlaire et une après une tumeur trophoblastique gestationnelle. Deux grossesses étaient menées à terme sans incidents et la troisième est en cours. # IV. Commentaire et Discussion Les maladies trophoblastiques gestationnelles comprennent un large spectre de pathologies du placenta, allant des lésions bénignes précancéreuses (les môles hydatiformes complètes ou partielles), aux tumeurs trophoblastiques gestationnelles (principalement les môles invasives, les choriocarcinomes et les tumeurs du site d'implantation). Chaque entité pathologique se caractérise par sa particularité clinique, radiologique, anatomopathologique, ainsi que son profil immuno-histochimique et cytogénétique. Les môles hydatiformes complètes sont généralement diploïdes et se singularisent par une dégénérescence hydropique de toutes les villosités avec prolifération plus ou moins marquée des cellules trophoblastiques. Elles ont une tendance vers une évolution précancéreuse. Les môles partielles sont la plupart du temps triploïdes, les vésicules môlaires sont mêlées à des villosités normales. On peut retrouver des tissus embryonnaires, voire un embryon avec activité cardiaque. Son évolution est le plus souvent favorable. [2]. Dans la môle invasive, les vésicules môlaires envahissent le myomètre et réalisent une tumeur dissociant la paroi utérine. Le choriocarcinome est une prolifération maligne de cellules trophoblastiques villeuses sans formation de villosités placentaires. La nécrose, l'hémorragie, la colonisation vasculaire avec diffusion métastatique contribuent à son mauvais pronostic. La tumeur du site d'implantation placentaire, nettement plus rare, est une prolifération des cellules trophoblastiques extra-villeuses particulières par leur sécrétion en hormone lactogène placentaire. # a) Incidence La fréquence de la môle hydatiforme varie de manière importante entre les races et les pays. Dans notre série la fréquence était de 1/283 accouchements, ce qui nous classe dans un rang de haute prévalence à coté des pays Asiatiques [3]. La majorité des études épidémiologiques tendent à démontrer que le risque relatif évolue sous la forme d'une courbe en « J » avec l'âge et la parité, et ce quelle que soit l'ethnicité et le pays. Le risque est plus élevé pour les femmes avant l'âge de 20 ans et après l'âge de 40 ans comparativement aux femmes entre 20 et 35 ans, ceci peut être expliqué par des facteurs génétiques, notamment par le vieillissement de l'ovocyte, par déficit en carotène et en vitamine A, qui favorisent les anomalies de fécondation et par une moindre réaction immunologique maternelle [4]. On peut situer le risque de récidive autour de 1% après une môle hydatiforme et de 11 à 30 % après deux môles complète [2]. La relation entre groupe sanguin et maladies trophoblastiques reste encore un domaine de recherche, puisque jusqu'à présent aucune explication n'est défendable. Les facteurs de risque connus des môles hydatiformes complètes, notamment l'âge maternel supérieur à 40 ans, la susceptibilité familiale et le groupe sanguin A, ne sont pas retrouvés dans les môles partielles. Le pourcentage important des môles partielles dans notre étude (43%) pourrait expliquer la discordance de nos résultats avec ceux de la littérature concernant l'âge, la parité et le groupage sanguin des patientes. # b) Diagnostic Les signes classiques de la môle apparaissent souvent après le premier trimestre comme les vomissements incoercibles (20 à 30% des cas), la prééclampsie (20 à 30% des cas), l'hyperthyroïdie (7% des cas) et l'insuffisance respiratoire (2% des cas). La môle complète est souvent plus symptomatique que la môle partielle dont les signes peuvent mimer un avortement spontané [5]. L'âge gestationnel moyen de diagnostic est d'environ 12 semaines d'aménorrhées [6]. De nos jours, le diagnostic est presque toujours porté devant des métrorragies avant l'apparition des autres signes cliniques. L'utilisation de l'échographie constitue un progrès réel dans le diagnostic de môle hydatiforme. L'image classique de la môle complète est celle en grappes de raisins occupant totalité de la cavité utérine sans association à une structure embryonnaire ou foetale. Les signes échographiques de la môle partielle sont plus discrets, n'atteignant qu'une partie du trophoblaste ; et il existe fréquemment des reliquats foetaux sans augmentation exagérée de la taille de l'utérus. L'échographique doppler peut retrouver une vitesse du pic systolique élevée et des index de résistance et de pulsatilité bas des artères utérines. Mais le rôle du doppler est limité et n'aura d'intérêt clinique qu'en cas de môle invasive. Les cellules trophoblastiques sécrètent l'hormone gonadrophine chorionique (hCG) qui sert de marqueur de la présence de tissu trophoblastique. Une valeur élevée de ?hCG sérique au moment de l'échographie oriente le diagnostic vers une môle complète précoce. Le diagnostic définitif nécessite une confirmation par l'anatomopathologiste [7]. Dans notre étude, toutes les patientes ont bénéficié d'un dosage de ?hCG, qui était élevé chez toutes les patientes avec des extrêmes de 6889 et 1123570UI/ml. Le taux était supérieur à 105UI/ml pour 69% des môles complètes, et 25% des môles partielles. # c) Traitement La prise en charge thérapeutique des môles fait appel, dans la très grande majorité des cas, à une évacuation utérine par aspiration et à la surveillance ultérieure du taux sérique d'hCG. Les recommandations de la FIGO publiées en 2006 signalent la possibilité de réaliser en fin d'aspiration un curetage prudent avec une curette tranchante, afin de vérifier la vacuité utérine. L'évacuation utérine doit être programmée aussi rapidement que possible compte tenu du fait que les complications augmentent avec l'âge gestationnel de la grossesse môlaire après 18 semaines d'aménorrhée [8] Actuellement, quelques indications chirurgicales persistent, notamment chez femmes ayant accomplis leurs projet parental, pour limiter les récidives des tumeurs trophoblastiques à haut risque métastatique, pour assurer l'hémostase en cas de complications hémorragiques graves et en cas de tumeur du site d'implantation. La modalité du traitement chirurgical la plus commune est l'hystérectomie totale interannexielle. Les tumeurs trophoblastiques n'étant pas hormono-dépendante et les métastases ovariennes étant rares, les ovaires pourront être conservés selon l'âge des patientes. Dans notre série, on n'avait pas réalisé d'hystérectomie. # V. Pronostic et Conclusion Les maladies trophoblastiques ont le plus souvent une évolution favorable, elles n'interfèrent pas dans l'avenir obstétrical de la femme, quoi qu'elles exposent à un risque important de récidive de la môle. Le taux global de rémission est de 80 à 95 % selon la littérature, sous réserve d'un suivi rigoureux selon des protocoles bien établis. La création un centre de référence de maladies trophoblastiques au Maroc à l'instar des centres existants déjà dans d'autres pays, pourrait apporter une aide à la décision aux médecins et de constituer une garantie de la qualité des stratégies proposées aux patientes. L'enregistrement de l'ensemble des maladies trophoblastiques permettrait ainsi d'avoir un registre à l'échelon national et les travaux de recherche clinique dans ce domaine en serait facilité. * Gestational trophoblastic disease ; www JMichael Seckl JNeil Sebire SRoss Berkowitz thelancet. com 376 August 28. 2010 * JMuhlstein FGolfier LFrappart GPoulizac FAbel ITouitou THajri D Raudrant ; les môles hydatiformes à répétition 2010 38 * Les maladies trophoblastiques gestationnelles. Classification, épidemiologie et bases génétiques M TissierI PhilippeE J. Obstet Biol. Reprod 29 2000 * Epidemiology and oetiology of gestational trophoblastic diseases; The lancet-Oncology AAndrea SFranceschi LaFerlayj CVecchia November 2003 4 * The diagnosis of molar pregnancy by sonography morphology HLindholm FFlam Acta. Obstet. Gynecol. 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